Guide complet des aurores boréales
Vous avez déjà rêvé de passer une fraîche nuit polaire, enveloppé par les volutes dansantes d’une aurore boréale ? Sans y passer toute la nuit, nous vous proposons de tout savoir sur les aurores boréales que vous pouvez photographier dans nos séjours d'automne et d'hiver, ou bien tout seul si le coeur vous en dit (ou avec nos concurrents, qui adorent venir chercher des idées ici).
Comment fonctionne une aurore boréale ?
Les aurores boréales (ou "australes" si vous êtes dans l’hémisphère sud) sont créées par les éruptions solaires, qui éjectent dans l’espace des particules (électrons, protons, ions), chargées d’énergie électrique. Lorsqu'elles sont attirées par le champ magnétique terrestre, ces particules solaires se regroupent près de nos pôles, dans une « zone aurorale » en forme d'anneau, comprise entre 65 et 70° de latitude (tiens, c'est exactement là que se situe l'Islande). Ensuite, au contact de la haute atmosphère, elles vont libérer leur énergie, en particulier sous forme de photons, créant ainsi le phénomène lumineux que nous pouvons observer.
Une zone aurorale vue de l’espace (photo ©NASA - Notre drone était un peu court).
Les aurores boréales ont généralement une teinte verte, car c’est la couleur principalement dégagée par l’oxygène. Celui-ci est l’élément dominant dans les particules solaires. Toutefois, en fonction de l’altitude du phénomène et des autres éléments présents (azote, hydrogène, hélium), d’autres couleurs peuvent également être présentes : rouge, bleu ou violet.
En arctique et notamment en Islande, vous risquez donc de voir le ciel s’illuminer de drapés colorés mouvants au rythme des vents solaires, lorsque la nuit est complète et qu’il n’y a pas de couverture nuageuse pour vous empêcher d’observer le phénomène. N’oubliez pas que les horaires de nuit sont particuliers à ces latitudes nordiques. En été (Mai, Juin, Juillet), il fait presque jour 24h/24. Il est donc impossible d’y observer les aurores boréales. Il faut donc prévoir son voyage Aurores en hiver (de Septembre à Mars).
Préparer sa sortie et trouver les meilleurs endroits
Deux facteurs vont conditionner vos chances d’observer une aurore boréale.
Le premier est l’indice Kp, qui indique la puissance calculée de l’aurore, sur une échelle de 0 à 9. Cet indice est déterminé à partir des données satellitaires mesurant l’activité solaire. Lorsque notre bon soleil éjecte beaucoup de particules, et qu'elles partent dans la direction de la Terre, l’indice Kp augmente, et vos chances de voir une aurore également.
L’indice Kp est disponible en Islande sur le site de la météo nationale. Voici le lien direct vers la page importante. Toutefois cet indice n’est pas toujours très fiable, car il arrive que les particules se dispersent pendant leur voyage qui dure entre 2 et 3 jours, et par conséquent, qu'elles ne soient jamais attirées par le champ magnétique terrestre. Mon conseil: sortez, même si l’indice n’est pas très élevé. Un indice de seulement 2 peut être suffisant pour qu’une aurore vous permette de très belles images.
L’indice Kp et la couverture nuageuse sont les deux points à vérifier avant de sortir.
Le deuxième facteur à surveiller est d’ordre météorologique : il faut absolument que le ciel soit dégagé, pour observer le phénomène qui a lieu à des altitudes comprises généralement entre 80 et 200kms, soit bien au dessus des nuages. Là encore, le lien que je vous ai donné vous permettra de savoir où aller (visez les zones blanches). Vous pourrez ainsi augmenter vos chances de voir les aurores à toute heure de la nuit. Enfin, choisissez l’endroit où vous allez faire vos photos en évitant de vous trouver trop près de sources de pollution lumineuses, comme les éclairages d'un village ou d'une ville. Ce ne sont pas les étendues désertes qui manquent à ces latitudes (nous, on en connait plein).
De 8h à 19h, nous photographions les renards polaires dans ce paysage hivernal, et après le dîner, on peut passer aux aurores !
Le matériel photo à prendre avec soi
Pour capter la lumière de l’aurore boréale, nous allons utiliser la technique de la pose longue. En effet, même si le phénomène est lumineux dans le ciel nocturne, nous devrons exposer notre image plusieurs secondes, ce qui impose d’être muni de deux choses essentielles : un appareil permettant le réglage de la vitesse d’obturation à des temps de plusieurs secondes (voire en pose B) et surtout un bon trépied pour que l’appareil reste absolument immobile pendant la pose.
Un appareil reflex sera ici l’arme idéale, puisqu’il vous permettra de gérer tous les paramètres d’exposition, mais il est également possible de réaliser des photos correctes avec des appareils compacts permettant un contrôle manuel des paramètres.
Pour l’objectif, un grand angle est idéal pour capter une grande partie du ciel (équivalent 15 à 24mm), et son ouverture maximale est une donnée primordiale : plus il sera lumineux et moins vous aurez besoin d’augmenter la sensibilité ou d'allonger le temps de pose. Cela vous garantira des images de meilleure qualité. Une ouverture de f/4 est suffisante, mais f/2,8 c'est nettement mieux !
Le trépied est un accessoire absolument indispensable. Je vous conseille un modèle en aluminium ou en carbone, qui se pliera de manière assez compacte pour être amené dans votre valise en avion (certaines compagnies ne l’accepteront pas en cabine). Pour varier les cadrages rapidement, il sera équipé d’une rotule « ball ». Vous pouvez également équiper votre boitier d’une plaque en L (ou L-bracket) qui permettra de passer rapidement d’un cadrage horizontal à un vertical sans devoir remettre le cadre à niveau entre chaque image. En effet, la forme des aurores varie parfois de manière rapide et il faut être assez réactif pour saisir les moments les plus esthétiques.
Prévoyez également plusieurs batteries de rechange, car elles peuvent se décharger plus rapidement dans le froid. Une lampe frontale est utile pour accéder aux réglages de votre appareil dans le noir, surtout lorsque vous n'avez pas l'habitude de travailler à tâtons. Enfin, une télécommande filaire peut compléter votre équipement. Elle vous permettra de déclencher facilement avec des gants, ou avec les mains dans les poches !
Le matériel photo nécessaire à la photo d’aurores boréales : trépied et sa rotule ball (Leofoto LS-324C et LH-40), boitier (EOS R5) muni de sa plaque en L (Leofoto), objectif grand-angle (IRIX 2,4/15mm), télécommande filaire et batteries de rechange.
Les réglages de base pour bien commencer
Pour saisir la lumière d’une aurore, vous aurez besoin de réaliser une pose assez longue pour fixer assez de lumière sur votre capteur, mais également pas trop longue pour ne pas que la rotation de la Terre ne soit visible. Si votre pose dépasse une certaine durée, les étoiles ne seront plus des points lumineux mais des traits plutôt inesthétiques. On appliquera la formule dite « des 500 » pour évaluer le temps de pose maximum. Il faut diviser 500 par votre focale en mm pour obtenir cette durée maximale. Par exemple avec un grand angle de 20mm, cela donne 500/20= 25 secondes. Attention, c’est une valeur maxi, et si vous voulez vraiment voir les détails de l’aurore, je vous conseille d’essayer de réduire cette durée au maximum, c'est à dire entre 5 et 10 secondes. Cela vous obligera à utiliser l’ouverture maxi de votre objectif et à augmenter la sensibilité, mais le résultat sera encore meilleur.
Pour ma part, je commence généralement mes séances avec cette combinaison : Mode manuel, 1600 ISO, f/2,8, 8 secondes. J’adapte ensuite l’exposition en fonction de la luminosité de l’aurore, en jouant sur la sensibilité ou l’ouverture. Le but étant de rester entre 5 et 10s de pose, avec la plus basse sensibilité. Pensez à vérifier l’exposition sur l’histogramme, pour ne pas vous laisser berner par la luminosité importante de l’écran arrière de votre appareil dans la nuit. C’est la seule manière fiable de vérifier que votre photo n’est pas surexposée ou sous-exposée.
Vérifiez que la courbe d’exposition est centrée dans l’histogramme pour vous assurer de la bonne exposition même dans la nuit.
Un dernier conseil pour la prise de vue : soignez votre mise au point. Pour les photos nocturnes, vous devez toujours vous mettre en mise au point manuelle, et réaliser le réglage à l’infini via l’écran arrière, l'appareil sur pied et en zoomant sur une étoile très lumineuse, ou un point situé à l’horizon. Une fois la mise au point faite et vérifiée, n’y touchez plus … Certains photographes scotchent leur bague de mise au point pour s’assurer qu’elle ne tournera pas. Pour ma part, je me suis offert un objectif IRIX qui possède une bague de blocage de la mise au point: le luxe (pour pas cher en plus !).
Traiter vos images
Si vous avez tenu compte de tous ces bons conseils lors de la prise de vue, le post-traitement de l’image devrait être très simple. Il vous suffira de « faire les niveaux » (pour que le ciel soit bien noir), et éventuellement de réduire le bruit numérique qui a pu être généré par votre pose longue ou la sensibilité ISO élevée.
Pour le reste, l’aurore saisie par l’appareil photo devrait naturellement être encore plus impressionnante qu’à l'oeil nu, car votre capteur est plus sensible aux contrastes générés par l’ambiance nocturne que vos yeux, qui s’habitueront progressivement à l'ambiance nocturne. Il ne vous reste plus qu'à mettre tout cela en pratique pour ramener ces belles images. Pour le traitement, vous ferez ça une fois rentrés à la maison, car n'oubliez pas que demain matin, les renards polaires seront levés tôt !